Il compte parmi les compositeurs vivants les plus connus de la planète, que bien des jeunes créateurs d’horizons géographiques et esthétiques très différents citent aujourd’hui encore comme l’une de leurs sources principales d’inspiration, voire comme un choc fondateur. Avec son énergie créatrice en apparenceinépuisable, SteveReichlaisserait presque penser que sa trajectoire musicale a toujours été un long fleuve tranquille. Dans ses œuvres les plus emblématiques qu’il a tenu à faire figurer au programme du Festival Présences 2024, on pourra cependant lire, en filigrane, son enfance chahutée entre New York et la Californie, les petits jobs qu’il a dû enchaîner pour asseoir son activité musicale, la résistance à un vent dominant qui poussait plutôt, pendant ses années d’études, vers le sérialisme prôné à Darmstadt, et dont Berio a su l’aider à se libérer. On y entendra aussi – pour peu qu’on laisse de côté l’idée facile qu’il serait un compositeur doublement répétitif, au sein des œuvres mais aussi entre elles – qu’il a su se renouveler à des moments clés en intégrant de nouvelles influences, et qu’il n’a jamais renoncé à ce qu’on pourrait appeler une radicalité accessible. Sa générosité se manifeste dans son travail avec les musiciens, mais aussi dans le temps qu’il a bien voulu nous accorder pour revenir sur certains points de son parcours, ses propos alimentant la totalité des citations qui figurent dans le présent portrait.
Parmi les titres de ses compositions des années 1980, apparaît trois fois le terme « ». De façon métaphorique et de son intérêt pour les procédures aléatoires, est entraîné « dans un monde sonore plus proche de Boulez, Stockhausen, Berio, alors que sa musique d’avant 1950 pointait vers ce que les gens appelaient minimalisme. John Cage était une force majeure et vous ne pouviez pas descendre la rue, parce qu’il se tenait devant vous, si bien que la seule chose possible était de le contourner ! » Aux voix de la musique savante occidentale qu’il admire de façon sélective – avec une éclipse entre Bach et Debussy, Stravinsky, Bartok –, et du jazz – l’écoute de Coltrane contrepointe l’enseignement de Berio à Mills College –, viennent un peu plus tard s’ajouter celles des percussions africaines, découvertes dans un célèbre ouvrage du révérend A.M. Jones, puis celle du gamelan indonésien, alors en pleine efflorescence sur les campus nord-américains, et dont se souvient la flûte d’ (1979).