Magistrat lettré, Éric Halphen a évidemment lu Le Dernier Jour d’un condamné, le brûlot anti-peine de mort de Victor Hugo. Mais c’est un autre ouvrage, moins grave, du grand homme, qu’il risque de tirer de ses rayonnages ces jours-ci : L’Art d’être grand-père, recueil de poèmes attendris publié en 1877. Quand nous le rencontrons chez son éditeur, le juge qui défraya la chronique en convoquant le président Chirac dans le cadre de la tentaculaire affaire des HLM des Hauts-de-Seine, en 2001, garde un œil poli mais nerveux sur son téléphone. Il guette le SMS lui annonçant la naissance de son premier petit-enfant. Dans quelle société grandira-t-il ? C’est l’enjeu de son cinquième roman, Les Divisions. À travers une affaire de violence conjugale que l’identité du mari brutal (un footballeur international français d’origine arabe) extirpe à la lugubre banalité, le magistrat de 64 ans – aujourd’hui affecté aux affaires de terrorisme et de crimes contre l’humanité – dresse le tableau saisissant d’une France malade, en proie aux clans et aux communautés. Chose incongrue pour un juge, nous l’avons passé à la question.
D’où est venue l’idée de ce livre ?
Je voulais traiter de tout ce qui fracture la société, c’est-à-dire le racisme, les histoires de mœurs, la force des réseaux sociaux et des médias, en l’articulant à mon envie