Il rêvait d’un clan soudé. Diminué, l’acteur assiste, impuissant, au combat fratricide que se livrent ses enfants
Dans cette demeure de Douchy jadis pleine de rires, maintenant, c’est le silence
La maison du bonheur est devenue le théâtre d’un drame familial. Dans ce domaine de 120 hectares isolé dans la forêt du Val de Loire, Delon a toujours dit avoir vécu les plus beaux moments de sa vie. Il y a protégé ses amours avec Mireille Darc puis avec Rosalie van Breemen, la mère d’Anouchka et d’Alain-Fabien. C’est à Douchy qu’ils ont grandi. L’acteur s’y voyait vieillir en régnant sur son clan. Il y a vingt ans, il confiait à Paris Match : « Je veux mourir dans mon lit avec les miens autour de moi. » Aujourd’hui, il continue de voir chacun de ses enfants, mais impossible de les réunir sous le même toit.
À la mort de Nathalie Delon, Alain demande à Anthony : « Tu t’occuperas de moi comme tu t’es occupé de maman si j’en ai besoin ? »
Par Danièle Georget
Si l’ambulance est escortée par deux motards, ce n’est pas parce qu’elle transporte une star. Ce 11 juillet 2019, le nom d’Alain Delon, 83 ans, s’inscrit sur le tableau clinique d’un patient victime d’un énième AVC, le troisième en un mois. En état d’urgence absolue, il est transféré de l’Hôpital américain à Neuilly, célèbre pour ses services de pointe mais plus encore pour son accueil de palace, à l’établissement phare de l’Assistance publique en matière neurologique : la Pitié-Salpêtrière. Le destin a pris soin de séparer les chapitres. Deux mois plus tôt, à Cannes, Delon a clos la partie cinéma avec une Palme d’honneur qui marque la fin d’une fâcherie. « Nous sommes heureux qu’Alain Delon ait accepté d’être honoré par le Festival…Il a pourtant longuement hésité », a annoncé son directeur général, Thierry Frémeaux, assaisonnant la formule rituelle d’une pointe d’acidité. « Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis », dit souvent Delon. Sa photo les larmes aux yeux, son trophée à la main, en est une nouvelle illustration : il avait juré de ne jamais remonter les marches. Pardonné l’oubli de la cinquantième édition du festival, quand ni lui ni Belmondo n’avaient été invités, ce qui donnera lieu à une des plus célèbres couvertures de Paris Match.
Que ces querelles semblent loin ! Mi-juin, d’intenses maux de tête conduisent Delon à l’Hôpital américain où un AVC est diagnostiqué. Mais il peut rentrer chez lui, suffisamment en forme pour faire une apparition éblouissante à la soirée des 70 ans de Paris Match où il retrouve Jean-Paul Belmondo. Le duo magique se reconstitue. Et Delon parle de ses projets, comme d’acheter une sculpture à l’artiste du moment, Orlinski : un loup, son animal totem. Il est ensuite soigné à Sainte-Anne avant un retour à l’Hôpital américain où, le 10 juillet, survient le deuxième « coup de tonnerre dans un ciel clair » et le lendemain, le troisième. On parle maintenant d’hémorragie cérébrale et d’opération de la dernière chance. Anthony, le fils aîné, dit son inquiétude quant à un éventuel « acharnement thérapeutique ». Il ne peut pas imaginer son père devenu l’ombre de lui-même. Il est certain qu’il n’acceptera jamais ce « naufrage de
