Absolue de tubéreuse, noire. Myrrhe, rouge sang. Vétiver, vert. Tanaisie, bleu « pétant ». Dans le laboratoire parisien de Christine Nagel, où naissent les parfums d’Hermès, les fioles d’ingrédients alignées sur les étagères dévoilent quelques nuances inattendues. Travailler avec ces essences est « un vrai cadeau », explique la parfumeuse à qui la maison laisse « la liberté de la couleur de ses jus ». Ce luxe n’est pas donné à tout le monde : à l’heure actuelle, les parfumeurs sont le plus souvent priés de composer des concentrés « crystal clear ». C’est-à-dire des mélanges d’ingrédients parfaitement transparents qui, une fois dilués dans l’alcool, donnent des parfums limpides que les marques peuvent ensuite colorer à leur guise. Cette exigence, très répandue, impacte mécaniquement la palette des parfumeurs. Car si la plupart des matières premières de synthèse sont incolores, c’est plutôt tout l’inverse du côté des naturelles.
Mais rassurez-vous : cela ne veut pas dire estime Christine Nagel, qui préfère les matières – entendez : non décolorées. Cela n’empêche pas la couleur d’être, pour elle, un territoire de création à part entière. Avec son départ tout en litchi, son nouveau Tutti Twilly a imposé le rouge comme une évidence. Mais ce n’est pas le parfum lui-même qui a été coloré : c’est le verre du flacon, teinté dans la masse, comme beaucoup d’autres créations de la maison.