Quatre enfants rescapés d’un accident d’avion ont sidéré la planète en survivant quarante jours dans la forêt amazonienne. Nos reporters ont retrouvé leurs familles
Manuel Ranoque, un père farouche et violent mais qui n’a jamais lâché les recherches
Il a fait figure de héros en quadrillant la jungle pour retrouver les jeunes disparus. Avant, il tenait surtout le rôle du méchant. À Puerto Sabalo-Los Monos, où il habitait, tout le monde est unanime, même ses parents : Manuel Ranoque buvait, maltraitait ses enfants et battait comme plâtre Magdalena, sa compagne. À tel point qu’il a été démis de ses fonctions de chef de village et que les guérilleros des Farc, qui contrôlent la région, l’ont sommé de déguerpir. Quinze jours avant le crash, il s’exilait à Bogota. Malgré les coups, Magdalena avait décidé de le rejoindre. Un aller sans retour…
Jour après jour, les sauveteurs découvrent des indices. C’est un chaman qui les mènera sur la bonne piste
Leur connaissance de la jungle les a sauvés. Les indigènes disent qu’ils ont été protégés par les esprits de la forêt
Méconnaissables mais saufs ! « J’ai faim » sont les premiers mots balbutiés par Lesly. Tien Noriel ajoute : « Maman est morte. » Selon le père, la fratrie serait restée quatre jours près de l’avion. Puis, sous la conduite de l’aînée, les enfants ont erré le long d’un cours d’eau, se nourrissant de baies sauvages et de farine de manioc récupérée près du Cessna. En chemin, ils ont ramassé quelques kits de survie lâchés dans les airs par l’armée. Une incroyable histoire sur laquelle se sont jetés les producteurs du monde entier. Et dont les indigènes négocient déjà âprement les droits.
Tandis que les enfants, sous le choc, restaient muets, famille et belle-famille se disputaient leur garde
De notre envoyé spécial en Colombie Charles Emptaz
La météo change vite sous l’équateur. Dans l’étouffante moiteur amazonienne, Hernando Morales chasse les moustiques et guette l’éclaircie depuis 4 heures du matin, quand le soleil transperce enfin le ciel, ce lundi 1er mai. « Le temps est parfait, on va décoller tout de suite », lâche le pilote en se dirigeant vers l’aéroport d’Araracuara. « Aéroport » est un bien grand mot pour qualifier ce confetti de rocailles perdu