«Rugit et gémit le vaste Dniepr […]. Il courbe les hauts saules jusqu’à terre/Lève des vagues pareilles à des montagnes. » Encensé dans les poèmes de Taras Chevtchenko, le fleuve majestueux n’est plus qu’une vaste étendue de boue aux abords de la ville de Zaporijia. « On savait que les Russes pouvaient bouleverser notre géographie en effaçant des villes entières, comme Marioupol ou Bakhmout, mais on ne pensait pas qu’ils seraient capables de détruire un fleuve », soupire Oleh Doudar, qui a toute sa vie vécu sur les rives du Dniepr, à Enerhodar, là où se trouve la centrale nucléaire de Zaporijia. Cet ingénieur a commencé à y travailler en 1986, l’année de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl. Trente-sept ans plus tard, il craint que le cauchemar ne recommence.
Jamais un pays aussi nucléarisé n’a été le théâtre d’un conflit de haute intensité. Si les quatre centrales ukrainiennes n’ont pas connu d’accident, celle de Zaporijia, la plus grande d’Europe, qui