Le troisième incendie se déclara le 5 août dans la grange à foin d’un corps de ferme abandonné, au lieu-dit La Combe, sur la commune de Malemort. Les flammes gagnèrent le bâtiment principal et consumèrent la totalité de la charpente, qui s’effondra peu avant l’arrivée des pompiers. Des braises projetées mirent le feu à 2 hectares de friche attenants et, bien que l’on ne sût déterminer l’origine des flammes, les deux précédents incendies – tous deux survenus durant la dernière semaine du mois de juillet, l’un ayant réduit en cendres le cabanon de bois du potager communal, l’autre un conteneur à poubelles – firent aussitôt suspecter la piste criminelle. Des traces de carburant avaient été retrouvées sur chacun des lieux. Le 8 août, un nouvel incendie dévasta 11 hectares de forêt sur la commune de Malemort, empuantissant pendant plusieurs jours la campagne alentour et provoquant cette fois un émoi général ainsi que la tenue d’une réunion publique organisée par le conseil municipal, où le maire en appela à la prudence et à la vigilance de chacun. Quatre incendies en un laps de temps si court, ça fait beaucoup, remarqua un villageois, surtout pour une commune de 3 000 habitants, ces actes ont tous été perpétrés sur le territoire de Malemort, il ne faut donc pas sortir de Polytechnique pour en conclure qu’il s’agit d’une vengeance, mais de qui et de quoi ?
Les têtes opinèrent et les regards scrutèrent l’assemblée, car il est bien connu des spectateurs de feuilletons télévisés que les récidivistes, qu’ils soient meurtriers ou incendiaires, trouvent une jouissance supplémentaire dans la contemplation des conséquences de leurs actes et sont souvent parmi ceux que l’on soupçonne le moins. Le commandant de gendarmerie Desfours, présent pour l’occasion, demanda plus de pondération, l’objet de la réunion n’étant pas d’attiser un climat de défiance et de suspicion. La gendarmerie, assura-t-il, faisait son travail. On quitta la salle des fêtes, on s’attarda par petits groupes sur le parking pour discuter à la lueur des plafonniers des véhicules aux portières ouvertes, secrètement galvanisé par le sentiment de vivre une aventure commune.
On rentra chez soi pour revisiter en famille, autour du dîner, le déroulé de la soirée, les déclarations