De l’étiquette royale à Instagram, un destin qui relie les siècles et les univers
Etre reine… la fonction prend tout son sens, toute son ampleur quand le couronnement advient. Avant, c’est une idée, après c’est une réalité. Elle a choisi de conserver son prénom, elle sera la deuxième Elizabeth de l’histoire du royaume à régner même si elle n’a jamais apprécié d’être associée à la première, la fille du terrible Henri VIII, qui régna sur le XVIe siècle sans mari ni enfants et qu’elle qualifiait de « despote ».
L’abbaye de Westminster a été fermée des mois à l’avance pour répéter la cérémonie du couronnement, les invitations envoyées à 7 840 personnes. Le 2 juin 1953, sultans, anciens Premiers ministres, maréchaux ou princes, tous n’avaient d’yeux que pour elle. Consciencieuse, anxieuse, Elizabeth s’était entraînée à porter la lourde couronne de saint Édouard, 2 kilos et 23 grammes d’or, sertie de pierres précieuses. La cérémonie s’est déroulée sans entrave malgré l’affolement des semaines précédentes avant que les ultimes gouttes du saint chrême utilisé pour le sacre soient retrouvées. À l’aide d’une cuillère de vermeil emplie d’onguent, l’archevêque de Canterbury a pu tracer le signe de croix sur la tête, la poitrine et les paumes des mains de la souveraine en prononçant la formule rituelle : « Comme Salomon a été sacré roi par le prêtre Zadok et le prophète Nathan, sois sacrée, bénie et consacrée reine des peuples, que le seigneur ton Dieu t’a donné à diriger et à gouverner. » Ce sera le seul moment dérobé aux caméras de télévision. Le prince Philip, alors chargé de la commission pour le bon déroulement des festivités – il fallait bien l’occuper –, avait plaidé pour introduire ces objets étranges au cœur du dispositif millénaire. Churchill a maugréé, craignant que les éclairages n’aveuglent Elizabeth ; l’historien Walter Bagehot a émis une réserve plus fondée : « Le mystère de l’institution est sa vie même, n’exposons pas sa magie à la lumière du jour. » Dans cette querelle des anciens et des modernes, Elizabeth II choisit la voie médiane. Soutenant Philip mais empêchant l’intrusion totale de la païenne télévision. Se doutait-elle que l’appétit médiatique ne ferait que croître, au point de manquer les dévorer ?
Au moins un couple fut, peut-être, reconnaissant de cette avancée technologique : le duc et la duchesse de Windsor qui purent assister à l’événement depuis leur sofa. Le duc songea sans doute à ce qu’il fut brièvement, le roi Edward VIII, avant de se retrouver exilé volontaire à Paris. L’ancien monarque avait préféré ne pas se montrer au sacre de sa nièce qu’il surnommait, mesquin et méchant, Shirley Temple. Avec Wallis, il a dû honnir encore une fois cette maudite famille puis éteindre l’écran
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