'âge et la maladie nous réduisent peu à peu à une conscience déclinante qui vit recluse dans ses souvenirs puisque, pour elle, ni le présent ni l’avenir n’existent plus. Avec Russell Banks ausculte les derniers soubresauts d’une telle conscience avant le néant, celle de Leo Fife, documentariste engagé vivant au Canada dont le travail sur les exactions de l’État américain au Vietnam aurait inspiré ; il avait lui-même fui les États-Unis en tant qu’objecteur de conscience. En 2018, atteint d’un mal incurable, Fife accepte la proposition de son disciple Malcolm de se confier sur son art au long d’un film intimiste tourné dans la pénombre. Ce qu’il révèle alors n’a rien d’attendu, puisque sa vie entière repose sur des strates de mensonges qu’il ne supporte plus et veut mettre au jour. Plutôt qu’à ses admirateurs, c’est à son épouse qu’il estime devoir la vérité: il exige qu’elle assiste à sa confession. Pour cette plongée dans l’étrange fonctionnement de la mémoire, indissociable des sens et aussi trompeuse qu’eux, Banks s’adresse plus à l’intellect de son lecteur qu’à ses émotions. Il ne mise pas non plus sur d’incessants rebondissements. Le coeur de son propos consiste à montrer avec acuité combien les intentions structurent les vérités acquises. Sur un rythme lent, on suit comment s’opère le choix du mensonge chez Fife comme chez ceux qui idéalisent son existence. Lancinante, une question très actuelle demeure en arrière-plan: faire
Russell Banks Oh, Canada
Aug 29, 2022
8 minutes
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