À VOIR ET À MANGER
Nous avons tous, un jour ou l’autre, dévoré un livre. Mais peut-on, au sens propre, se nourrir d’art ? Avec ses airs de sujet de bac philo, la question agite penseurs et gastronomes depuis que Platon a déclaré que non, la cuisine c’est juste un savoir-faire, contredit quelques siècles plus tard par un Jacques Attali persuadé qu’au contraire, « comme les meilleurs des artistes de tous les autres arts, [elle] glorifiera la vie, et saura, par le souvenir, transmuter l’éphémère en l’immortel ».
De l’art ou du cochon ? Peut-être le plasticien Carsten Höller, dont la singularité est célébrée dans les plus grands musées du monde, saura-t-il mettre tout le monde d’accord. Cuisinier amateur mais qu’on devine obsessionnel, l’artiste allemand a ouvert en mai dernier à Stockholm un restaurant nommé Brutalisten, vingt-huit couverts à peine, mais dont la renommée traverse déjà les frontières. Essentialiste, pratique et très portée sur le béton brut, l’architecture celle des patates bouillies avant le gueuleton d’inspiration française de ladite Babette. On craint que du passe-plat s’échappe un fumet de contrition. La gourmandise est un vilain défaut, vous expierez au pain sec et à l’eau.
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