Journaliste, écrivain, musicologue, grammairien, traducteur, pilier pendant trente ans du Jacques Drillon est mort le 25 décembre 2021, à 67 ans. Il avait publié en 2018 premier tome de ce qu’il n’a pas nommé « autobiographie »titre qui a la force de l’évidence et l’ironie de la prémonition. Plus que le précédent, ce volume est un patchwork, sans fil directeur ni chronologie trop précise, d’autant que Drillon évacue tout ce qui concerne sa vie privée, sachant qu’on ne doit jamais parler, discrétion oblige, de ce qui importe le plus : Plus qu’une autobiographie, c’est un autoportrait par artistes interposés, une guirlande de saynètes (« Le Kinésithérapeute négligé », pur chef-d’œuvre) et de dissertations sur des écrivains (Muray, Ponge, Berl, Mallarmé, Nerval, Céline, Beckett) et des compositeurs (Boulanger, Boulez, Stockhausen, Dusapin) mêlées de confessions et d’avis sur tous les sujets – la douche versus le bain, les dictionnaires et la typographie, l’art de fabriquer des listes ou des mots croisés. Impérial dans la rosserie, Drillon balance son lot de méchancetés et règle au passage quelques comptes. On se demande si le côté « kaléidoscope » du livre a été voulu par l’auteur ou s’il a manqué de temps pour tout recomposer ; peu importe, ses coq-à-l’âne ont l’attrait des spicilèges, celui du disparate.
