Une mythologie de la pauvreté
«Elle consiste en une place d’une grandeur trèsconsidérable, et en un très grand cul-de-sac puant, boueux, irrégulier, qui n’est point pavé », où grouillent « des gueux imposteurs qui sont sujets d’un Roi, nommé le grand Coësre, et qui contrefaisant dans les rues les borgnes, les boiteux, les aveugles et les moribonds, avec des hurlements et des langueurs imaginaires, escroquent des aumônes qu’on ne leur feroit pas sans ces supercheries; mais qui ne sont pas plutôt de retour chés eux, qu’ils se dégraissent, se débarbouillent, et deviennent sains et gaillards en un instant, et sans miracle. » C’est ainsi que l’historien Henri Sauval a formalisé le mythe de la cour des Miracles en 1724 dans son œuvre Histoire et recherches des antiquités de la ville de Paris.
AU ROYAUME DES GUEUX…
Car c’est bien d’un mythe dont il s’agit, même s’il a été – dans lequel le personnage de Pierre Gringoire s’aventure par erreur sur le territoire de ces gueux – a assis la légende. Celle de sociétés secrètes établies dans les bas-fonds de Paris sous l’Ancien Régime, interdites aux honnêtes bourgeois, organisées en corps hiérarchisés et dotées de coutumes, de rituels et même de langages propres… « lité, avertit d’emblée Vincent Milliot, professeur d’histoire moderne à l’université Paris-8 et spécialiste des régulations sociales, des systèmes policiers, du peuple et de la pauvreté en Europe à l’époque moderne. »
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