Passivité et impuissance
ans les témoins interrogés par Claude Lanzmann, non pas les victimes, les rescapés, mais ceux qui avaient vécu à côté des camps d’extermination de Chelmno, de Treblinka, d’Auschwitz-Birkenau, les paysans, les commerçants, les cheminots qui avaient vu les juifs arriver, avaient remarqué la fumée sortir des cheminées et senti l’odeur, et entendu les cris mêlés à ceux des oies, ils le film de Luke Holland, ce sont leurs semblables de Bergen-Belsen, des gens du voisinage, paysans, ouvriers, fournisseurs en tous genres, tous impuissants, passifs, complices, techniquement innocents, qui sont interrogés soixante-dix ou quatre-vingts ans après les faits. Et Luke Holland pose à peu près les mêmes questions: comment ça se passait, que faisiez-vous, que saviez-vous? Mais il demande aussi: que ressentiez-vous, à l’époque? Et aujourd’hui, vous sentez-vous coupables? Pourquoi n’avez-vous rien fait? Des questions que Lanzmann ne leur posait pas. Probablement parce qu’il ne voulait pas qu’ils y répondent, et risquer de les entendre s’expliquer, se justifier, comprendre, regretter, demander pardon, et l’obtenir. Cette phase interminable de l’histoire de la Shoah n’intéressait pas Lanzmann. C’est en ce sens que c’était un film, le sien, pas un cours d’histoire.
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