Les brumes de Vladivostok

élènebrûlaitdedécouvrir Vladivostok, le grand port de l’Extrême-Orient russe. La ville qu’on lui avait décrite n’avait plus grand-chose à voir avec la triste base militaire des années soviétiques, ni avec le port interlope des aventuriers. C’était toujours le terminus du mythique Transsibérien mais, à part les nostalgiques voyage , on y débarquait plutôt par avion, d’où l’on voyait se déployer la ville autour de ses ports.

Un voile de brume enveloppait ce jour-là l’immense baie qui serpentait au pied des collines. La vieille ville militaire autrefois interdite gardait tout son mystère et son pouvoir de fascination.

Hélène savait que « Vlad » avait entrepris à grande vitesse une cure de jeunesse et de modernité : architecture et monuments liftés, vieux quartiers remis au goût du jour, fêtes et festivals menés tambour battant. Du haut de la colline du Nid d’Aigle, le Japon, la Corée, la Chine, tout proches, n’étaient plus scrutés à la lorgnette des militaires mais à celle des touristes.

Toutefois, elle n’était pas là pour visiter la ville, mais pour l’acteur Yul Brynner.

Elle l’avait choisi pour sa troisième biographie, après celles consacrées à Ingrid Bergman et Marlene Dietrich, deux actrices européennes qui devaient leur réussite à Hollywood. Lui aussi avait commencé sa jeune carrière à Paris après une enfance russe et chinoise. C’était donc sur les traces de ce Juli Borrissovitch Bryner, né sur la côte du Pacifique, qu’elle s’était envolée pour Vladivostok.

Il y avait longtemps que le personnage la fascinait. Ce curieux mélange de Suisse et de Mongolie dans ses gènes, cette errance familiale après la Révolution russe, de la Chine à la Riviera française ; ce touche-à-tout parisien, polyglotte et cultivé, tour à tour trapéziste, guitariste tzigane et accessoiriste, et, enfin, acteur de théâtre.

Sa carrière s’était affirmée à Hollywood, mais que savait-on vraiment des jeunes années de Juli ?

Pour en apprendre un peu plus, elle avait rendez-vous le lendemain de son arrivée