Moto Revue

L’élite de rouge

« La dernière moto de Superbike que j’ai essayée? Ben, c’est pas compliqué, elle a fini dans un mur à Kyalami », se marre Régis Laconi avant de reprendre: « Ça ne nous rajeunit pas, ça fait 12 ans… Mais ce petit tour sur la moto de Grégory Leblanc, c’est aussi l’occasion de constater qu’aujourd’hui, une moto dérivée de la série offre de sacrées performances! » Si c’était moi qui l’avais dit, on aurait trouvé ça normal, presque convenu. Mais dans la bouche d’un vainqueur de GP 500, vice-champion du monde de Superbike, ces mots résonnent logiquement plus forts. Bon, il faut dire que la moto de série dont on parle, c’est déjà une moto d’exception: une Ducati V4R, spécialement développée par l’usine pour) réglementairement à 1 000 cm. Une moto de « course » homologuée dont le prix catalogue s’affiche à 40 000 €. Une jolie somme. Et de cette base, le team TWR (The White Racing. Pour ceux qui ne supportent pas l’anglais, « the white » signifie le blanc, Leblanc donc pour ceux qui ne suivraient vraiment pas) a poursuivi le travail, optimisant les performances de l’engin en respectant le règlement du championnat de France Superbike. Le moteur est resté standard, seule une métrologie aux petits oignons (italiens, les oignons) a été opérée afin de peser, mesurer et au final, coordonner au plus près les pièces en mouvement pour tirer de ce 4-cylindres en V le potentiel maximal. Pour envisager la liste de tout ce qui a été fait sur la belle italienne, reportez-vous vite à l’encadré ci-contre, pour la suite de l’histoire, celle qui s’écrit avec des gouttes de sueur et des larmes de joie, restez collé aux lignes qui suivent. « J’ai été très surpris par la maniabilité de la moto, elle tombe toute seule en virage, vraiment toute seule… Le train avant est super précis, et puis les pneus, les slicks Pirelli, y’a avec celle des pneus sportifs homologués route », poursuit Laconi. De mon côté, c’est déjà la garde au sol qui m’a surpris. Le staff technique de Leblanc a rehaussé de 8 mm la hauteur de cette Ducati (à laquelle il faut aussi ajouter les suspensions plus fermes), des changements qui se mesurent par le fait que désormais, naturellement, mon slider de genou ne vient plus frotter le bitume du circuit manceau. Moi qui, dès les premiers virages, et avec une Panigale V4S sortant de couvertures chauffantes, laissais du plastique un peu partout, là, j’ai perdu la jauge… Me voilà devenu aveugle du genou… Heureusement que les yeux, eux, fonctionnent plutôt bien. Parce que les quelques points de repère que je prends me sautent carrément au casque. Ça déboule grave, notamment dans la courbe Dunlop où je me fais brasser les cervicales à chaque fois que je sors la tête de la bulle (pas super enveloppante) avant de prendre les freins et de préparer mon entrée dans le premier gauche. Surtout, ne pas confondre les pédales garçon! Ni les manettes d’ailleurs, au risque d’aller jouer au culbuto dans un bac à gravier bien trop abrasif pour de si belles plastique et mécanique. Parce qu’elle pédale la Ducati n° 38, comme le confirme Régis Laconi: « Je pensais que, comparée à la 1100 que j’utilise pour les roulages Ducati, la 1000 serait un poil creuse. En fait, non, elle est vraiment très pleine, le moteur prend beaucoup de tours et l’allonge est impressionnante. C’est juste moi qui manque de roulage avec ce type de moto pour aller encore plus loin. » Et c’est Régis qui dit ça? En même temps, il a grosso modo tout dit. Juste qu’au début, elle m’a fait peur cette Ducat’… Lors des photos de travelling initiales faites en suivant à faible allure mon photographe allongé dans le coffre d’une voiture, je trouvais la position réservée par cette V4R de course pas franchement accueillante. Autant dire que je m’imaginais souffrir aussi à rythme plus soutenu. Eh bien non, on trouve de la place au moment où les chevaux déboulent! Les jambes ne sont pas trop repliées, les guidons ni trop ouverts, ni trop fermés, on peut se reculer sur la selle, se protéger dans la bulle, bouger et enrouler ses cuisses autour du réservoir, bref, on a de l’espace. Et c’est tant mieux, parce que les performances sont si élevées qu’on apprécie de ne pas être exagérément contraint par la position de conduite. Des Watts, y en a plein. Viva aux assistances électroniques qui, tapies dans l’ombre, jugulent et rattrapent en toute discrétion les erreurs que je n’ai sûrement pas manqué de commettre… Ce qui m’a aussi plu, c’est que sans être – c’est le moins qu’on puisse dire! – dans les chronos de son jockey habituel, l’ensemble ne m’a pas trop chahuté. Une moto de course, c’est toujours pensé pour la performance maxi, et conçue pour fonctionner sur un gros, gros, rythme. Si on ne rentre pas dans le spectre de chronos permettant à l’ensemble de travailler (surtout le châssis), on ne voit pas grand-chose, on se fait bringuebaler et finalement, on ne prend pas beaucoup de plaisir, en tout cas paradoxalement moins qu’avec une moto standard aux aptitudes plus… « humaines ». Ben là, ce ne fut étonnamment pas le cas.

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