Le spectre de la «guerre civile»
insi donc, nous voilà en guerre. Pas contre le Covid. Pas contre le terrorisme. Contre nous-mêmes. Les militaires pétitionnaires l’assurent (et le général de Villiers l’avait dit avant eux): la guerre civile est imminente. Michel Onfray surenchérit: «Nous sommes en guerre civile.» Qu’on me permette d’user ici du privilège de l’âge. Commençant mes études supérieures, au début des années 1990, je me souviens de ces camarades disant d’un air grave: «le pays est au bord de l’implosion», «la révolution est là». L’érudition alerte mai 2002, dix jours après le coup de tonnerre qui avait ébranlé le paysage politique. Il y avait là une rhétorique dont la virtuosité a déserté les écrits pétitionnaires: le fond, lui, est demeuré le même lorsque étaient pointés du doigt «la haine répandue dans nos rues et les brandons de la guerre civile attisés au plus haut niveau». En 2010, c’est Marine Le Pen qui, à propos de Nicolas Sarkozy, évoquait une situation de «pré-guerre civile» caractérisée par le «terrorisme urbain». En 2016, Jean-Pierre Chevènement était affirmatif: «La guerre civile est devant nous.» La même année, lors de la primaire de la droite, Alain Juppé associait la réélection du même Sarkozy à un «risque de guerre civile». Ces amabilités n’ont pas empêché Nicolas Sarkozy, en 2020, de faire part de sa vive inquiétude pour la «paix civile».
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