VENDEE GLOBE 2020-21 L’énigme PRB
sur les naufrages, c’était pareil mais en pire. En quatre secondes, le bateau a planté, l’étrave s’est repliée à 90°… C’est un truc de barjot. Plier un bateau en deux! J’en ai fait mais celle-ci… » Les premiers mots de Kevin Escoffier, tout juste récupéré par Jean Le Cam après des heures d’angoisse passées sur un minuscule radeau de survie ballotté par une mer chaotique, font froid dans le dos! Avec les images de ce sauvetage qui ont fait le tour du monde, le Vendée Globe renoue avec son essence originelle. Celle d’une aventure humaine qui voit des hommes et des femmes affronter seul(e)s les espaces maritimes les plus reculés, quatre IMOCA étaient immédiatement déroutés par le PC course sur la zone du naufrage. Kevin Escoffier, balayé du pont de son bateau déjà à demi immergé avant même d’avoir percuté son radeau de survie, puis embarqué sur ce dernier, établit un premier contact visuel avec Jean Le Cam avant que les deux compères ne se perdent de vue dans la nuit tombante. Les conditions météo franchement hostiles du moment ayant fait échouer toute tentative de récupération, c’est finalement au milieu de la nuit, sous GV seule à trois ris, que Jean Le Cam peut enfin repêcher Kevin Escoffier. Si on peut se réjouir de cette issue heureuse, due à la lucidité de Kevin, à ses équipements de sécurité et au talent de Jean, pour autant de sérieuses questions demeurent. Comment un bateau destiné à boucler un tour du monde par les trois caps peut-il se briser en deux tel un vulgaire fétu de paille? Ces IMOCA à dérives, refités en foilers dans un second temps, auraient-ils une fragilité intrinsèque? Si c’est le cas, certains marins actuellement en course comme Isabelle Joschke, Sam Davies et d’autres ont du souci à se faire. Leurs IMOCA sont de la même génération que , celui d’Isabelle est même issu du même moule… Nous avons donc mené notre enquête auprès d’anciens coureurs comme Alain Gautier, responsable du Team MACSF, Roland Jourdain, d’ingénieurs du composite et du « Boat Captain » de Sam Davies, Eric Lamy. Il apparaît – et tous les professionnels interrogés s’accordent sur ce point – que Vincent Riou, en lançant en 2009 la construction de chez CDK Technologie, voulait un IMOCA le plus léger possible avec l’ambition d’aller plus vite que les autres. Le gain de poids – ce qui sous-entend mettre le moins de carbone possible – serait devenu le leitmotiv du chantier qui se serait traduit par une section avant réalisée en monolithique carbone avec lisse et une partie arrière en sandwich carbone nid-d’abeilles avec cloisons structurelles, le tout avec des échantillonnages dosés au plus juste. Ce choix explique peut-être les problèmes structurels survenus dès les premières courses.
