«Le gouvernement nous accusait de terrorisme journalistique.»
La presse va mal. En France, comme partout ailleurs. Seule exception dans ce marasme, Le Canard enchaîné . Deux grandes feuilles libres, imprimées en bichromie sur du papier à repasser au fer chaud pour les lire sans se salir les mains, des dessins satiriques, des articles au ton sans autre pareil, des révélations comme s’il en pleuvait, des titres qui jouent avec les mots, une chronique entièrement dédiée à l’art du contrepet ( L’Album de la Comtesse ) et surtout pas un poil de pub. Phénomène unique, immuable, à la réussite insolente depuis sa fondation en 1915. Sa devise dit tout: «La liberté de la presse ne s’use que quand on ne s’en sert pas.» La recette de ce succès: avoir su, dans les années 1970, transformer un journal satirique en machine à cracher les révélations, qui n’épargne rien ni personne. Le public adore, les puissants tremblent. Aux manettes, une petite équipe de journalistes et de dessinateurs dirigée tambour battant pendant plus de quarante ans par le même rédacteur en chef: l’inoxydable Claude Angeli qui, à huitante ans et des brouettes, signe chaque semaine des révélations qui n’en finissent pas d’énerver le tout Etat français.
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