Richard Saul Wurman L’art de la conversation
Richard Saul Wurman est un drôle d’oiseau. A un âge où la plupart de ses émérites congénères s’attellent à coucher leurs mémoires, lui martèle qu’il déteste disserter sur son passé. Agé de 83 ans, ce respectable Américain renie aussi le principe d’héritage : alors qu’il a écrit près de 90 livres, il se félicite de s’être débarrassé des copies de la plupart. Richard Saul Wurman a pourtant de quoi raconter. Le jeune Wurman a été l’assistant de Louis Kahn – l’un des plus grands architectes du xxe siècle. Au milieu des années 70, alors designer et architecte plébiscité, il est l’un des pionniers de la théorie de l’architecture de l’information. Et puis, surtout, en 1984, Wurman crée les conférences TED (Technology, Entertainment, Design), un format de discussion révolutionnaire. Ambitieux, intellectuel, fou, libre, son modèle a érigé la conversation publique au rang d’art, semant la graine de ce qui allait devenir un empire auquel il est difficile d’échapper. Si, depuis qu’il l’a vendu en 2003, TED a évolué en autre chose – un produit plus marketé, plus policé, plus global, dont il se sent à des années-lumière –, Richard Saul Wurman, lui, continue de lutter contre sa pire phobie, l’ennui, en abreuvant sa soif d’apprentissage à coups de nouvelles conférences et d’écriture de livres. Pour évoquer tout cela, il nous a reçus, chez lui, dans son immense maison d’Ocean Beach, le quartier le plus huppé de tout Miami, entre ses toiles de maître et les meubles qu’il a lui-même designés, avec Isaac et Jacob, ses deux labradors, jamais loin. Rencontre avec un personnage qui revendique une forme de liberté extrême, et qui n’a pas peur de déplaire.
The Good Life : Votre tout dernier livre s’intitule Understanding Understanding. A 83 ans, votre soif de comprendre est donc toujours aussi grande ?
Je ne suis pas quelqu’un de spécialement doué, et il y a beaucoup de choses que le simple humain que je suis ne comprend pas. Je suis, par exemple, en train d’écrire un livre sur la mort, car nous, simples mortels, sommes ignorants sur ce sujet. Aucun éditeur ne m’a pourtant demandé d’écrire ce livre, qui va s’intituler Je n’ai pas décidé de le faire par ambition, mais simplement parce que je me pose des tas de questions : où les gens naissent-ils et où meurent-ils
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