Protocole oblige, il n’a pu éviter l’« initiative politique d’ampleur » d’Emmanuel Macron à la Maison de la Légion d’honneur le 30 août, ni sans doute la réception en l’honneur de Charles III au palais du Luxembourg ce 21 septembre. En cette fin d’été, Gérard Larcher n’a pourtant en tête qu’une échéance, celle des élections sénatoriales du 24 septembre. Un scrutin qui ne passionne guère le grand public, mais pour lequel il mène une intense campagne. Il devrait y décrocher son sixième mandat de sénateur des Yvelines – la première fois qu’il est entré à la Chambre haute, il avait 37 ans, il en a désormais 74 – et être reconduit président (LR) du lieu.
Il est comme ça Gérard Larcher, attaché à des enjeux et à une méthode que les politiques classiques dédaignent. Les Français le connaissent peu. Pas assez moderne, pas assez tranchant. Un peu ennuyeux, au fond, à force d’être raisonnable. Pour le définir, chacun y va de son adjectif: « rond, bienveillant, empathique », « terrien, chasseur, aimable » ou « intelligent, madré, adroit ». La nuance est fonction de la lucidité de l’interlocuteur. En raison de son air débonnaire, de son allure de hobereau et des petites attentions qu’il accorde à chacun, beaucoup ont tendance à le sous-estimer.
Lui joue jusqu’à la caricature l’homme des territoires et de la ruralité, convaincu que. Il aime raconter son élection, enfant, comme « bébé Blédine » car, qui pourrait en vouloir à un ancien moutard jovial, aux joues rondes, ainsi distingué? Il a quelques phrases qu’il répète volontiers comme ce « on ne dit jamais oui par discipline ou non par dogmatisme » ou « le blé doit être semé avant d’être récolté ». Les sénateurs qui le connaissent bien adorent l’imiter en répétant: « Nous sommes les territoires », « les territoires doivent être autonomes… » Ils connaissent par coeur le propos, mais ne s’en lassent pas. Quelques rares le classent au rayon des dinosaures, la plupart rendent hommage à l’un des « derniers monstres politiques encore en activité ». Au palais du Luxembourg, on le salue pour son amour du temps long, de l’ancrage local, de la politique avec un grand P. Ces dernières années, face au nouveau monde macronien, face à cette « start-up nation » un brin dédaigneuse pour des sénateurs perçus au mieux comme ronronnants, au pire comme inutiles, il a su incarner la résistance aux yeux de ses pairs.