En art, on pourrait dire que le XXe siècle débute autour de 1910, avec la naissance du cubisme et de l’abstraction, le Sprechgesang et les Ballets russes. L’orgue demeurait alors, essentiellement, serviteur d’une église où nulle tribune n’eût admis ces scandales fondateurs : le pape des instruments n’aura eu ni son Pierrot lunaire ni son Sacre du printemps; c’est petit à petit qu’il se dégage de la gangue fonctionnelle et du poids de son héritage. Il n’est pourtant pas étanche à l’air du temps : dans ses scherzos ou le menuet de sa Symphonie no 4, Louis Vierne mâtine la pénombre postromantique d’un expressionnisme grinçant ou naïf.
Les décennies 1920 et 1930 le voient devenir, à part, grâce à d’ambitieuses improvisations à programme couchées ensuite sur le papier; à l’instar de Charles Tournemire, Maurice Duruflé enchâsse le chant grégorien dans les rets de sensuelles arabesques et Jean Langlais flirte avec un baroque ou un folklore fantasmés, tandis que l’inclassable et jeune à jamais Jehan Alain confie à son orgue l’intensité de ses sentiments et un imaginaire exotique.