N SOUTIEN-GORGE jeté sur un portant, un pinceau gisant au sol, un oreiller avachi, un livre fermé, des persiennes closes et une femme renversée sur un canapé, masque occultant sur les yeux et tête rejetée en arrière, les bras en croix, verre à la main. C’est l’insomnie transcrite par Brigitte Aubignac sur la toile, où, la première à être présentée dans l’espace temporaire de Lee Ufan Arles, fondation créée l’an dernier dans la souspréfecture des Bouches-du-Rhône, sur le site de l’hôtel Diport-Vernon, par le plasticien coréen. Ce dernier a donné carte blanche au critique d’art Philippe Dagen pour élaborer un parcours artistique, à condition qu’il soit figuratif, en opposition avec son propre corpus. Le commissaire invité a ainsi réuni les oeuvres de cinq artistes d’âges et d’origines divers, travaillant en France sur la thématique de la figure humaine isolée. Comme Brigitte Aubignac, la jeune Ymane Chabi-Gara peuple ses tableaux de mobilier et d’objets de toutes sortes. Même si, chez elle, l’encombrement et la superposition des éléments qui le cernent, ou le recouvrent littéralement, tendent à faire disparaître l’être humain, ici l’ (« celui qui vit coupé du monde » en japonais), aux yeux fermés et à la posture figée. Les figures seules de Marc Desgrandchamps sont représentées, quant à elles, souvent de dos. Leurs contours géométriques et les lignes aussi translucides qu’énigmatiques qui font office de décor coupent court à toute interprétation et rendent, de fait, leur perception moins immédiatement évidente, moins saisissante. Tandis que les compositions de Tim Eitel et de Djamel Tatah restituent au contraire, en leur ôtant tout environnement ou décor explicite, la solitude extrême de leurs personnages respectifs, le premier allant jusqu’à faire s’évaporer le protagoniste du cadre dont il ne reste plus qu’une silhouette évanescente.
Figures seules, du retranchement forcé à la disparition
Jul 27, 2023
2 minutes
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