L’épouse idéale ? « Une femme qui fait aussi bien la sauce béarnaise que l’amour. » Un peu court, mais c’est ce qu’affirme par exemple James Bond dans Les Diamants sont éternels. À l’heure de MeToo, la nouvelle édition anglaise de la saga 007 (Ian Fleming Publications, sortie le 13 avril) maintient la remarque, alors que les éditeurs ont pourtant demandé à un nouveau type de relecteurs, les « sensitive readers », de débusquer des expressions aujourd’hui politiquement incorrectes dans les livres de Fleming. Certains termes à caractère raciste sont donc passés à la trappe. Le mot « nigger » a disparu, et les barmen ne sont plus noirs.
Pour le machisme, il faut néanmoins examiner de plus près les thrillers imaginés par Fleming entre 1952 et 1964 (d’autres ont pris la plume après sa mort), car les flamboyantes et omniprésentes héroïnes y sont loin d’être des potiches. Toutes ont un gagne-pain, certes plus ou moins fantaisiste. Elles peuvent être agent secret, cartomancienne, ramasseuse de coquillages, croupière. En tout cas, elles gagnent leur vie, pas si courant dans les années 1950-60. Cette singularité résonne en écho avec la vie de leur créateur, dont on ne retient souvent que la misogynie ordinaire de cette époque.
« Dans la réalité, les femmes de Fleming, celles que l’on connaît en tout cas, étaient indépendantes, remarque Christian Destremau, auteur d’une biographie bien documentée (Ian Fleming, éd. Perrin). Appartenant à un milieu social privilégié, elles étaient fortunées, plus que lui en général, et il ne risquait pas de De ce qu’on sait, le parcours sentimental de l’auteur des James Bond se révèle en effet aussi tonique que celui de son héros.