“Je dirais que le début de ma pratique photographique, il y a environ seize ou dix-sept ans, est lié aux voyages et à la solitude. Je terminais mes études en psychologie et je voyageais autant que possible. J’emportais avec moi un vieux Canon 24×36 qui appartenait à ma mère. J’avais, je m’en souviens, déjà ce désir fou de photographier l’intériorité, et je me servais de la. Avec la surimpression, on ne sait jamais à quoi s’attendre : on prend des photos qu’on ne peut pas visualiser sur le moment, on ne voit pas ce qu’on crée. On va vers l’inconnu. Une année ou deux passent, Hervé Baudat, un ami photographe, m’appelle et me dit : Je n’ai pas réfléchi, je l’ai pris. C’est un Rolleiflex 2,8 GX qui ne me quitte plus et dans lequel je mets essentiellement de la Tri-X 400, pour son grain et son contraste. J’ai également une chambre 4×5 pouces, une Graflex, mais finalement, je m’en sers assez peu pour le moment. Et puis récemment, Fuji a sorti un nouvel appareil photo instantané : l’Instax Square. L’idée de retrouver le format carré comme sur un Polaroid me plaisait. J’avais un petit stock de films Fujifilm Instax qui traînait dans mon frigo lorsque le confinement est arrivé. Une phrase de Bachelard s’est mise à tourner indéfiniment dans mon esprit : J’ai alors commencé une nouvelle série d’autoportraits Polaroid, en allant de ma chambre au jardin et de mon jardin à ma chambre. C’était simple et immédiat. J’en prenais un par jour, parfois moins. Chaque fois qu’apparaissait une image inédite, je craquais une allumette et je la brûlais. Je voyais l’image se métamorphoser de manière profonde, rapide, frappante et définitive. La chimie du Polaroid réagissait avec la chaleur de la flamme, et de cet effacement, ce trou, cette ouverture (ou les trois à la fois) naissaient de nouvelles nuances, de nouvelles couleurs. J’entrais à l’intérieur de la photo, à l’intérieur des corps.
Linda Tuloup
May 11, 2023
2 minutes
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