Pour Josette Torrent, la Résistance a commencé en chanson. Comme Bourvil et de Funès dans La Grande Vadrouille ; la fiction détrônée par l’Histoire. La grande, entrée dans sa vie au son d’une autre musique: celle des bottes des soldats allemands foulant les pavés de Saint-Malo, à l’été 1940. Josette Torrent a 10 ans et sa vie bascule une première fois. Partir à l’école masque à gaz sous le bras ; penser en rations. « À ce rythme-là, la vie risque de se limiter bientôt à manger, dormir, attendre, rire peu et se taire souvent, écrit-elle dans un livre à paraître mercredi. Est-ce que le rêve est interdit depuis juin 1940 ? »
Le 1er septembre 1942, Josette Torrent a 12 ans et sa vie bascule une deuxième fois. « Tu entendras quelqu’un siffler Auprès de ma blonde […]. Tu devras être sûre de ton coup, Josette », lui dit son père, Michel, sur le ton de la confidence. Avec sa mère, Thérèse, et sa sœur cadette, Micheline, ils ont fui la Bretagne et trouvé refuge en zone libre, à Perpignan. Un retour aux sources : les Torrent sont catalans.
Ce jour-là, en rentrant du collège, la jeune fille découvre son père allongé sur le carrelage de la cuisine, paralysé par des abcès douloureux. « Ce dont je vais te parler doit impérativement rester entre nous, lui dit-il alors, l’air grave. Je vous aime toutes les trois. Plus que tout. Et je ferai tout ce que je peux pour vous protéger toujours. Mais avant cela, il y a la France, tu comprends ? »
Michel Torrent ouvre les vannes d’un secret lourdement porté et raconte, qui veulentcettequi fédère un peu partout sur le territoire, ce mouvement appeléet dont elle pense d’abord qu’il s’agit d’une nouvelle boutique de vêtements ; et le réseau Gallia, qui regroupera jusqu’à 2 500 personnes dans la clandestinité.