Dans l’ouvrage qu’il publie cette semaine chez Allary éditions, le parlementaire européen (Place publique) raconte comment la Russie infiltre nos démocraties – et nos esprits – depuis des années. Vertigineux.
La thèse centrale de votre essai intitulé La Grande Confrontation est la suivante : même si les villes européennes ne sont pas bombardées par la Russie, nos démocraties subissent depuis au moins deux décennies une guerre hybride menée par Vladimir Poutine. Expliquez-nous.
Raphaël Glucksmann Il est fondamental de comprendre que cette guerre n’a pas commencé le 24 février 2022 ni même en 2014 (lors de l’annexion de la Crimée et de l’occupation du Donbass), mais longtemps auparavant. De plus, elle ne se limite pas aux frontières de l’Ukraine, mais se déroule en Europe, en Afrique et ailleurs. Tous les événements guerriers qui ont eu lieu depuis le début du XXIe siècle font partie d’une grande confrontation, qui se traduit militairement – Géorgie (2008), Syrie (2015), Ukraine – ou, de manière indirecte, sans opérations militaires.
Je parle ici des ingérences menées lors des campagnes électorales (celle du Brexit au Royaume-Uni, les présidentielles aux Etats-Unis et en France), de la manipulation des opinions à travers les propagées par les fermes à trolls d’Evgueni Prigojine sur les réseaux sociaux, des campagnes antifrançaises signées par le groupe Wagner en Afrique, des cyber attaques contre nos institutions ou nos hôpitaux pendant la pandémie, de la polarisation des débats sur des médias russes (RT, Sputnik) et du financement de mouvements politiques hostiles à l’Europe. Sans oublier la corruption des élites qui acceptent de travailler pour une capitale étrangère hostile aux intérêts la guerre énergétique qui vise à nous rendre dépendants de la Russie. La confrontation est partout à la fois.