Après le Journal de l’année de la peste de Daniel Defoe, Les Fiancés d’Alessandro Manzoni, La Mort à Venise de Thomas Mann, La Peste d’Albert Camus, Le Hussard sur le toit de Jean Giono ou Némésis de Philip Roth, le Prix Nobel 2006 Orhan Pamuk s’inscrit à son tour brillamment dans la littérature d’épidémie.
C’est une petitede repartir après son escale à Mingher, et contraint la jeune sultane et son tout nouvel époux, le docteur Nuri Bey, éminent spécialiste des épidémies, à rester sur l’île. Amateur des aventures de Sherlock Holmes et de science moderne, le tyran exige alors du médecin qu’il résolve le meurtre de son prédécesseur, le docteur Bonkowski, assassiné quelques jours plus tôt dans l’île, et qu’il sauve Mingher du fléau. Le protocole sanitaire instauré prend vite un tour politique. L’épidémie, vécue diversement par les différentes communautés, devient le théâtre de confrontations, les tenants de l’hygiénisme à l’occidentale s’opposant à ceux d’un fatalisme spirituel rétif à toute mesure. Lorsque la quarantaine sépare les familles, que les Minghériens ne peuvent plus enterrer leurs morts, quand le crime fait florès sur la douleur et le dénuement, les insulaires perdent la raison et le sens commun. Prières, dénonciations, amours clandestines, trafics, spoliations, opportunisme, courage et bassesse, tous les ingrédients du chaos s’entremêlent alors.