Toute biographie est inachevée
’il y a un effet collatéral, discret mais remarquable, à la récente exhumation non sans fracas de manuscrits inédits de Genet, de Proust et de Céline, c’est bien celui-ci: l’éclatante vacuité de l’expression « biographie définitive ». Celle-ci nous vient du milieu éditorial anglo-saxon, les Etats-Unis et l’Angleterre ayant été – et demeurant – les terres promises de ce genre littéraire. Peu de biographies échappent à ce label. Généralement, dès que leur épaisseur excède avec ce que cela suppose de décisif, d’irrévocable, d’exhaustif et de final. Tout récemment, le d’Andrew Roberts, le de Richard Zenith, le sur Sebald de Carole Angier n’y ont pas échappé. Et, comme en France nous n’aimons rien tant qu’importer souvent le pire des moeurs étrangères sans le moindre esprit critique, on a vu fleurir ces dernières années sur des bandeaux et publicités – si ce n’est sous la plume des critiques – cette expression extravagante. Maurice Thorez n’aurait pas pu dire: « Il faut savoir terminer une biographie! », car une biographie n’est jamais achevée. Sa vocation est même de demeurer inachevée. Comme si ce type de recherche pouvait jamais être clos! Comme si on pouvait assurer qu’aucune découverte ne pourrait jamais remettre en question le fragile édifice, l’incertaine mosaïque, le puzzle précaire de la reconstitution d’une vie et d’une oeuvre! Passe encore s’agissant d’une vie de Jules César (quoique…). Mais de celle d’un contemporain, de quelqu’un dont la vie et l’oeuvre ne sont pas encore terminées!
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