Voile Magazine

Détonnant voyageur

’anecdote laisserait sans doute rêveur un coureur d’aujourd’hui : le 27 juillet 1929, au lendemain de son arrivée au Havre, Alain Gerbault est accueilli en triomphe dans la tribune d’honneur du stade Roland-Garros pour la finale de la Coupe Davis : les 15 000 spectateurs lui font une ovation debout, on interrompt le match, on chante la Marseillaise, joueurs et personnalités diverses montent féliciter le héros du jour… Cette démesure donne est à cet égard un client parfait : ce fils de bonne famille, né à Laval en 1893, s’est illustré comme pilote de chasse entre 1916 et 1918, puis par ses talents de joueur de tennis. Il cultive depuis l’adolescence une certaine excentricité, amateur de motos et de voitures de sport, monarchiste convaincu, plus attentif aux modes anglo-saxonnes qu’à celles de Paris. La rencontre avec la navigation ? Elle ne doit pas grand-chose aux influences familiales malgré les étés passés dans la propriété de Dinard et les virées à Chausey à bord du bateau paternel. Jusqu’à l’âge de 27 ans, Gerbault pense davantage au tennis qu’à la mer. Après la guerre, il vit de l’héritage laissé par ses parents tout en se construisant un palmarès dans les tournois de double. La littérature et des rencontres heureuses de plaisanciers vont convaincre ce terrien que le voyage au long cours pourrait constituer l’alternative idéale pour échapper à la banalité d’une existence trop rangée. A Cowes en 1922, il tombe sous le charme du vieux , l’achète aussitôt, le conduit en Méditerranée avec l’aide d’un matelot et commence ses préparatifs. Au printemps 1923, il appareille de Cannes, rejoint Gibraltar en trois semaines puis met le cap sur New-York qu’il atteint… après 101 jours de navigation ! Tout concourt à ce record de lenteur : bateau mal adapté au solitaire, navigation approximative… A l’opposé de ses prédécesseurs Joshua Slocum et Harry Pidgeon, Gerbault n’est pas un homme de terrain, plutôt un citadin qui a théorisé ses rêves. Et malgré son manque d’expérience il ne croit qu’en lui, négligeant les avis des autres marins et des instructions nautiques. En 1924, après un long séjour en France où les journalistes se pressent pour entendre ses récits de tempêtes apocalyptiques, il repart vers les Bermudes, Panama, les Galapagos… et la Polynésie. On a tout dit sur la passion qui le liera sa vie durant à ces îles. Il faut lui rendre justice de son combat contre l’acculturation planifiée par les autorités coloniales. Mais il n’est pas si sûr que sa vision fantasmée d’un peuple « pur », figé dans le temps, serait appréciée aujourd’hui par les intéressés… La « route du retour » par le cap de Bonne-Espérance sera ponctuée de longues escales techniques avant le retour en fanfare que l’on sait.

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