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Légumes des jours

aintenant que les librairies sont officiellement décrétées « commerces essentiels » au même titre que les épiceries, on est tenté d’y pénétrer avec sérieux. Ce serait dommage, car les libraires risqueraient d’en perdre leur humour, eux qui en ont tant entendu. Des perles d’inculture, ils n’ont qu’à se baisser pour en ramasser. Mais, comme le client est roi, ils ne les partagent la plupart du temps qu’avec les collègues. Ou exceptionnellement dans un livre. C’est le cas de Shaun Bythell, (Autrement) propose une ingénieuse et désopilante taxinomie à la Linné de ses clients. Il les classe par genres ( ou l’expert; ou le flâneur…) et sous-catégories ( ou le raseur; ou le conjoint qui s’ennuie…), le pire étant peut-être l’expert autoproclamé, qui se sent tenu de vous faire une conférence sur son sujet, sans oublier ou le conspirationniste, très tendance. Il faut croire que Shaun Bythell vise juste, puisque ses observations, toutes de dérision, d’ironie et de finesse, se révèlent d’une portée universelle. Ses bipèdes monomaniaques en quête de livres introuvables et bon marché sont peut-être écossais mais on a les mêmes en France. D’où la saveur de son petit traité bourré d’anecdotes. Il est si complet que je m’y suis trouvé: genre ou le client parfait, sous-catégorie (inutile de traduire, vous m’avez reconnu). Un homme si ouvert d’esprit qu’il n’est pas fixé sur un titre, qui ne marchande pas – et qui est rare. Dans le même esprit mais en plus français, il avait été précédé ces dernières années par Jean-Loup Chiflet et David Alliot, chacun auteur d’irrésistibles anthologies et autres colliers de perles de librairie. de Zola, pourrait figurer dans les deux recueils; ils vous trouveront « mais je me rappelle plus de qui » (de Laurence Pernoud); quant au roman de Victor Hugo le plus demandé par les collégiens de la Seine-Saint-Denis, nul doute, c’est . On y trouvera le fameux best-seller de Balzac dans les stations de ski, . Le fantôme d’Albert Camus doit supporter tous les jours d’entendre: « Vous avez ? ? ? » L’époque est aux affaires. Deux pour le prix d’un sans faire exprès en entrant dans une librairie pour y acheter un Tolstoïevski.

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