Christian Liaigre, l’esthétique sinon rien
vec lui, c’est tout un monde qui est né. Sans lui, ce monde-là n’est pas près de disparaître. Car ce culte du dépouillement, cette passion pour le mobilier architectural et les volumes minimalistes, qu’il a poussés au paroxysme, ont été amplement copiés. Notamment le précepte qu’il définit depuis le début: exprimer une nouvelle idée du luxe en assurant la maîtrise totale de l’esthétique, c’est-à-dire concevoir un volume et un mobilier destinés à être diffusés en showrooms. Derrière cet ascétisme parfois radical et ces lieux qu’il confectionne comme des robes de haute couture se cache l’amour de l’authenticité, des matières nobles, des métiers d’art et des lignes monacales qui défendent une simplicité vendue à prix d’or. confirme l’architecte Tristan Auer, qui a travaillé Depuis 1985, où tout a commencé, ce minimaliste a fomenté les passions, surtout des années 90 à 2000. Larry Gagosian, Marina Abramovic, Rupert Murdoch ou encore Carole Bouquet lui confient leur intérieur. Jusqu’à Karl Lagerfeld, quand il envoie balader sa pantagruélique collection de mobilier XVIII chez Christie’s au début des années 2000: le styliste va se meubler exclusivement chez Christian Liaigre… et en livres d’art! Car si le décorateur a rendu intemporels les matières naturelles, le bronze, les bois sombres ou clairs d’origine française (chêne et cèdre), le cuir, le lin, les écrus, sans bannir parfois des rouges, des jaunes et des bleus forts qui font entorse au règlement, il a néanmoins fait du non-motif sa marque de fabrique tout en créant plus de 300 pièces de mobilier. Parmi elles, des œuvres iconiques: le tabouret (1986), le canapé (2000), la chauffeuse (2007), le fauteuil (2008) Certains de ces meubles ont même atteint de belles enchères lors de ventes chez Piasa et Artcurial. écrit l’historienne d’art et journaliste Françoise-Claire Prodhon, autrice d’une monographie, (Rizzoli New York, 2020). Christian Liaigre, qui a dessiné les boutiques de Marc Jacobs, de Calvin Klein ou de Karl Lagerfeld, a ouvert une dizaine de showrooms dans le monde, notamment aux États-Unis, grâce au réseau de la créatrice Holly Hunt. À Paris, il a aussi lancé une galerie, désormais fermée, rue de Verneuil et a finalement établi son showroom dans un hôtel particulier, rue du Faubourg-Saint-Honoré. regroupe le travail des cinq dernières années de la Maison Liaigre, qu’il quitta en 2016, et dont il nomma directrice artistique la designer allemande Frauke Meyer. Liaigre a débuté à Paris en 1990, en rénovant le très prestigieux Hôtel Montalembert et a clôturé son parcours exceptionnel dans cette même ville, en assurant la direction artistique d’un autre hôtel de luxe, l’aile Castiglione (ex-Lotti) du Costes, pour Jean-Louis Costes, en collaboration avec les équipes Liaigre. Mais il a aussi été l’artisan de sa propre transition managériale en nommant, dès 2009, Christophe Caillaud à la présidence du groupe. En 2016, il vend définitivement sa société à des fonds d’investissement basés en Asie et spécialisés dans l’immobilier de luxe et l’hôtellerie.
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