Qu’est-il en train de nous arriver ? Depuis plus d’un mois, beaucoup de Français, de toutes origines, ont le sentiment de vivre un mauvais rêve. Dès le 7 octobre, alors que les images des pogroms du Hamas sur des civils israéliens nous parvenaient, la France renforçait la sécurité aux abords des écoles juives et des synagogues. Par habitude de voir la haine antisémite galvaniser les esprits et encourager les passages à l’acte. Voilà, hélas, qui n’a pas manqué. Mais si l’effet de contagion était attendu, les proportions, elles, sont inédites. Et jettent une lumière crue sur l’état de notre société. Depuis le 7 octobre, la France a enregistré plus de 1 500 actes antisémites – soit davantage qu’en 2022 –, sans compter les messages de haine déversés par milliers sur les réseaux sociaux.
Dans ce climat inédit, empiré par un débat public déréglé, les grandes voix comptent plus que jamais. C’est pourquoi L’Express est allé interroger l’une d’entre elles : la philosophe Elisabeth Badinter. « Pour la première fois depuis la dernière guerre mondiale, beaucoup de juifs ont peur au point de taire leur nom, de se cacher, constate-t-elle. Si la spécialiste des Lumières « n’imagine pas la France sans juifs », elle ne cache pas sa grande inquiétude. « Depuis quarante ans, l’islamisme radical, qui est une maladie de l’islam, s’installe en France, prend des formes diverses, qui virent à la violence. Une culture très différente de la nôtre, antithétique à nos valeurs, a entrepris une politique d’entrisme et de victimisation systématique qui tue. Si vous vous refusez au diagnostic précis et