SVHS : Ce qui aurait dû être une “opération spéciale” de quelques jours dure depuis plus d’un an et demi. Qu’est-ce que la Russie a mal anticipé ?
Officier général responsable de la prospective à l’état-major des armées : Le point principal est l’échec du renseignement, sur tous les plans. Les autorités russes n’ont pas prévu que la population ukrainienne se rangerait comme un seul homme derrière le président Volodymyr Zelensky et son armée. L’armée russe est l’armée du mensonge : nous avons vu ici les effets délétères d’une armée où les chefs tactiques ne sont pas capables de dire la vérité à leur supérieur. Échec stratégique aussi parce que l’opération a été lancée sur quatre à cinq directions différentes, avec un éparpillement et une mauvaise maîtrise du niveau tactique et opératif. Il y a eu des erreurs assez surprenantes, comme des colonnes de blindés à découvert ou des convois logistiques pris dans des embouteillages et détruits par l’artillerie.
Céline Marangé : Le plan opérationnel initial était fondé sur de faux postulats. Les dirigeants russes ont planifié une opération de décapitation du pouvoir en pensant que la campagne informationnelle, très intense, puis les intimidations militaires et le choc de l’invasion suffiraient à paralyser les Ukrainiens et à les faire capituler. L’armée ukrainienne était très bien organisée en défense, avec une vraie agilité d’emploi, c’est-à-dire une capacité à diluer ses forces et à leurrer l’ennemi, ce qui a compliqué le ciblage. Dispersés, les Ukrainiens ont pu causer des dégâts aux forces russes tout en préservant leurs moyens.
SVHS : La capacité d’un peuple à s’organiser peut donc faire la différence en 2023 ?
L’Ukraine en est un exemple éclatant. Les Russes ont très mal anticipé la réaction de la population ukrainienne qui n’a pas accueilli l’armée russe en libératrice ; ils n’ont pas bien apprécié ses motivations patriotiques, sa force d’âme. Dans les deux jours