WESTERN
DE MARIA POURCHET
(éd. Stock)
Son précédent roman, (2021), histoire d’amour illégitime et haletante entre deux paumés de l’époque, avait marqué les esprits. Pressenti pour le Goncourt, il avait raflé de nombreux prix. Maria Pourchet, diplômée de sociologie, a probablement ressenti une certaine pression à l’heure de publier , son nouveau roman. Ce livre vient s’inscrire dans la catégorie des romans post-MeToo qui tentent de donner une texture à de Vanessa Springora, de Virginie Despentes, ou de Lola Lafon. Dans , Alexis Zagner, acteur adulé, monstre sacré au sommet de son art, se voit menacé d’un #MeToo alors qu’il s’apprête à incarner, au théâtre, un modernisé. Une sombre histoire de viager lui fait croiser la route d’Aurore, mère divorcée, surmenée par son . Une héroïne aussi fragile et touchante que l’était Laure dans , et à laquelle toute quadragénaire urbaine des années 2020 s’identifiera sans difficulté. Une femme qui ressent le besoin de s’isoler dans une maison rustique des Causses héritée de sa mère, comme s’il fallait se couper du monde pour aller mieux. Un peu comme l’écrivaine qui a besoin de solitude pour poser sur l’époque, les médias, les moeurs, la justice, un regard tranchant et acerbe. Tout est complexe et juste, dans . L’archétype de Dom Juan, invité surprise de cette fresque contemporaine (“espèce menacée […] passé en quatre cents ans de fils de pute à martyr”), permet à l’écrivaine d’explorer la figure du mâle blanc éploré qui ne peut plus rien dire. Aurore, héroïne déchirée, parle des ambiguïtés d’une certaine génération face à la révolution culturelle féministe. Elle est engoncée dans une vision archaïque de la féminité, écrasée par des normes concernant l’apparence et la maternité, mais aussi animée d’un élan émancipateur, d’une surprenante aptitude à la rébellion. Une femme en dents de scie qui s’agace des hommes qui n’écoutent qu’euxmêmes et ne semblent jamais traversés par la honte mais qui dépend de ce “patriarcat doudou, lapin synthétique usé et puant, deux oreilles faméliques tissées par des grandes petites filles” (l’une des plus puissantes métaphores de ce texte qui en fourmille). Tout est juste, jusqu’à la réflexion générationnelle incarnée par l’écart entre Chloé, jeune victime d’Alexis, et sa mère éplorée. Et surtout, entre Aurore et Cosma, son fils “gentiment astral”, seul personnage mature et clairvoyant du roman. Comme si, finalement, seule l’enfance était capable de se repérer dans cette époque trouble.