Tout au bout de l’Europe, à la périphérie septentrionale du Vieux Continent, se trouve l’Estonie (1,3 million d’âmes), point de contact avec l’Empire russe depuis des siècles. Digne de Game of Thrones, le décor médiéval de la frontière, à Narva, résume tout. Des deux côtés du fleuve, à portée de catapulte, deux forteresses se dressent l’une contre l’autre. Fondé par les Danois au XIIIe siècle, revendu aux Teutons, contrôlé par les Suédois pendant deux siècles et finalement conquis par Pierre le Grand en 1704, le fort de Narva tutoie l’imposante et sinistre forteresse d’Ivangorod, bâtie en 1492 sur l’autre rive pendant le règne d’Ivan III. Voici à quoi ressemble la frontière de l’Otan avec la Russie de Poutine.
« Si les Russes nous attaquent un jour, ils passeront nécessairement par ici », affirme le garde-frontière estonien en désignant le pont qui enjambe le fleuve Narva, fermé aux citoyens russes mais quotidiennement traversé par des réfugiés ukrainiens, comme, ce jour-là, une famille qui a fui la région inondée de Kherson. « C’est par ici également que nous défendrons notre pays sans laisser les Russes pénétrer en Estonie », ajoute le colonel de la 1re brigade d’infanterie Andrus Merillo, sur la base de Tapa, où les soldats estoniens et ceux de l’Otan (dont des Français) sont sur le pied de