Des centaines de moutons, des bergers dans les alpages et des patous pour garder les troupeaux. Voilà le cadre d’un reportage que je réalise en mai 2019 accompagné du journaliste Jules Prévost. Nous sommes missionnés par le magazine Regain, un trimestriel axé sur la ruralité, qui démarrait alors sa deuxième année d’existence. En basse montagne, dans un décor alpin, notre reportage nous amène à traiter le sujet du loup qui, depuis 1992, recolonise l’Hexagone et remet en question le pastoralisme tel qu’il est pratiqué. Pour ce sujet, nous nous sommes intéressés à l’initiative Pastoraloup, un programme dans lequel des bénévoles viennent accompagner les éleveurs. Ils sont formés et déployés l’été pour dormir dans les alpages et garder les troupeaux contre les attaques. Durant trois jours, nous avons accompagné les bénévoles lors de leur formation et sommes partis aussi à la rencontre d’éleveurs qui ont fait le choix de s’inscrire dans cette démarche.
Comme chaque fois avant de partir en reportage, un point a été fait avec l’iconographe sur les images à rapporter. Il s’agit de bien rappeler l’angle de l’article envisagé, mais également la ligne graphique et éditoriale du média. Dans mon souvenir, peu de consignes avaient été en l’occurrence données, si ce n’est celle d’un des chefs qui m’a demandé sans sourciller de rapporter la photographie d’un loup. Il a fallu expliquer bec et ongles qu’en trois jours de reportage, il me serait impossible de réaliser une telle photographie. Les meilleurs photographes animaliers prennent des jours à l’approcher et ne sont même pas sûrs de pouvoir l’apercevoir, alors un reporter armé d’un 35 mm et sans aucun sens de l’affût… autant chercher une aiguille dans une botte de foin.
Contrairement à ce qu’il faudrait faire dans l’idéal, je suis parti sans réelle culture de l’image. J’avais peu de travaux de référence en tête sur de Raymond Depardon. Ce n’est pas rédhibitoire, mais j’en ai bien vu l’intérêt lors d’un reportage en Belgique sur des reconstitutions militaires de la bataille des Ardennes. Nous avions échangé avec l’iconographe autour d’images d’archives, notamment celles de Robert Capa, afin de pouvoir s’immerger plus facilement dans le reportage et d’être le plus juste possible lorsqu’il s’agit de retranscrire ce qu’il se passe.